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Affichage des articles associés au libellé polar

Ne jetez pas la pierre

 N'exagérons rien ! — Donald E. Westlake — Super noire n° 101 Mai 1978 Un excellent moment de lecture avec le numéro 101 de l'éphémère série super noire. Un polar pour les amoureux du septième art. Une bouffée de nostalgie pour les années 70. Carey Thorpe, critique de cinéma, assassin occasionnel et addict au Valium, se révèle être un redoutable détective. Un livre aussi plein d'humour que de cadavres et garanti 100% sans morale. Mais avec une mise en garde, mise en vers par Brassens : « sur les femmes de flics, ne jetez pas votre dévolu, cette faute de goût, ne la commettez plus ! » Extrait : Patricia Staples n'était pas du tout désagréable à regarder mais, bonté divine, quelle pénitence que de l'écouter ! De taille et de poids moyens, des cheveux blonds soyeux, de grands yeux bleus innocents, des lèvres roses et un nez droit, elle avait l'air d'une fille sur un paquet de flocons d'avoine ou sur une couverture de Liberty Magazine de 1943, et rien qu'

Pas d'innocents

 Ted LEWIS — Get Carter — Rivages/noir 04/2022 Un polar anglais de 1970. Jack Carter, un affranchi quitte Londres pour une ville ouvrière du nord qui l'a vu naître et où son frère aîné et pas aimé vient de mourir. Une mort suspecte pour qui sait lire entre les lignes et qui reconnait les signes de la corruption policière. Un polar très sombre qui dépeint une humanité pleine de ressentiment, de bêtise et d'avidité. Pas d'innocents, que des méchants. Pas de rédemption, mais beaucoup d'exécutions. Un authentique chef d'œuvre adapté deux fois au cinéma avec Michael Caine d'abord et plus récemment avec l'inénarrable Stallone. Extrait : — Eh oui, les choses changent. Pas assez vite à mon goût. Mais un jour, tout cela aura disparu. Et, grâce au ciel, les gens pourront élever leurs enfants dans des conditions décentes. Un jour, ils auront envie de rester chez eux au lieu de traîner dans la rue. — Vous croyez toujours que ce qui viendra à la place sera mieux. — Oh, m

Tuer n'est pas jouer

Planque à Luna-Park – Richard Stark   Série noire n° 1472 18/02/1972 Slayground en VO. Jeu de mot avec Playground (terrain de jeu), et slay (tuer). Un Parker sans bavure, sans rayure qui tire un trait sur les crevures qui prétendaient le doubler. Le scénario habituel. Après un braquage réussi et une fuite loupée, – un complice trop fébrile –, Parker se trouve coincé dans un parc d'attraction, fermé au public mais pas aux malfaisants qui veulent voler le magot. Parker fera tourner les manèges pour brouiller les pistes et la galerie des glaces révélera sa maîtrise de la réflexion. Les malfrats qui croyaient chasser une proie apeurée, vont découvrir un prédateur calculateur et sans pitié. Moralité : « Touchez pas au grisbi ! » Extrait : S'adossant au mur à côté de la fenêtre, il observait le portail. Le gibier n'allait pas tarder à devenir chasseur. (page 167)

Promoteurs mafieux : pléonasme ?

Patrick Raynal - Nice-Est - Calmann-Lévy 1988 Un privé pourri et bourré qui craque. Se prend pour Zorro. Nice, le cours Saleya, le quartier la Madeleine, l'inévitable Ariane et des promoteurs mafieux. Après le coup de torchon au 12 à pompe, il lui faudra émigrer... en Afrique ! Un vrai polar qui respecte tous les codes du genre avec du pan-bagnat pour la couleur locale. Inoxydable et intemporel. Raynal au sommet de sa forme. Extrait : M'a montré le dernier numéro de L'action Municipale . Un toubib y affirme sans rire que le SIDA nous vient d'un nègre qui aurait enculé un singe vert. Vachement rapide le black. Duraille de se farcir un singe dans son élément naturel. (page 85)

Le marionnettiste

 ou l'autobiographie d'un tueur Patrick Raynal Noires racines 10/1999 — Édition du Masque Le parcours d'un jeune, beau et intelligent, manipulateur et séduisant, — toute ressemblance avec un candidat aux élections prochaines est forcément fortuite —, qui bascule du côté obscur de la force. Un polar politique qui met le focus sur la fâcheuse tendance des foyers Sonacotra à finir incendiés. Et une étude brillante et glaçante sur la perversité du pouvoir, toujours établi par le mensonge et la violence. Un polar qui fait écho à celui de Lucarelli et Camilleri avec des fonctionnaires de police corrompus et fascistes. En 1965, Tixier culminait à 5%, aujourd'hui le score de l'extrême droite flirte avec celui d'Hitler en 1932. Extraits : Il se marre sans comprendre. Encore un qui appris l'humour dans les colonnes d' U Ribombu . (page 24) Je suis devenu le spécialiste des coups tordus en tout genre, une sorte de génie en la matière puisque jamais personne ne me r

Les petits pois sont rouges !

 Meurtre aux poissons rouges — Camilleri & Lucarelli — Fleuve noir Nov 2011 traduit par Serge Quadruppani titre original : Acqua in bocca Le sage montre la lune et l'imbécile regarde le doigt. Ainsi les critiques babelioteux, fascinés par les poissons rouges et les seins de Betta, sont restés aveugles à l'essentiel, la dénonciation de la collusion de la mafia et du pouvoir. Stratégie qui empoisonne l'Italie depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Et qui éclaire l'impunité des nervis fascistes et l'emprise de la pieuvre sur la société transalpine.

Les postiches ne sont pas des potiches

 Une joie féroce — Sorj Chalandon — GRASSET 08/19 Un casse, place Vendôme, par quatre folles en chimio. Un os, la plus belle petite fille du monde est une photo volée sur le net. Les belles histoires sont des arnaques. Mais elles donnent la volonté de s'en sortir, de réussir. Même si le crabe ne relâche pas tous ses otages. Un polar dur et féministe qui mérite bien ses quatre étoiles. Extrait : — Les voyous arabes ou corses vont nous manquer, tu vas voir. Ils n'étaient pas comme les crapules qui arrivent de l'Est. Ils nous la faisait à la régulière. — Des Français, quoi, avait répondu l'autre en terminant son verre. (page 142)

La retraite du braqueur

Road dogs – Elmore Leonard – Rivages/thriller 08/2010 Un Leonard un peu mou du genou, malgré une technique magnifique et une mécanique bien rodée. Foley sympathisant avec un marielito aussi méchant que macho ne m'a qu'à moitié convaincu.  Karen Sisco ne fait pas son come-back et Megan, l'avocate surdouée disparait après son premier tour de piste. Mais la finale est crépitante, farfelu, saignante et rigolote. Et la morale est presque sauve, l'aube se dissipe et l'héritage dispense de braquage et permet une retraite confortable. Extraits : Les « mecs-les-vrais » commençaient à se liguer contre elle, ils raisonnaient encore avec leur mentalité de détenus, leur système de solidarité et leur fierté de mecs : ils étaient plus forts que les filles — une vérité à prendre dans son acceptation habituelle — donc c'était eux qui commandaient, et celui qui commande à toujours raison. Depuis le début elle avait craint qu'ils ne tombent dans ce schéma-là, elle espérait que

Démons sur la baie des anges

 Après les chiens — Michèle Pedinielli — Édition de l'aube 2019 Polar sur Nice. Une ville pas si gentille. Une ville semblable à Vichy, avec un passé plaqué or d'émigrés chics et un présent paupérisé avec des migrants choqués. Ville phare, ville leurre, ville d'échouage, d'Anglais aristocratiques et de Russes blancs au passé clinquant des années vingt puis d'Africains basanés à l'avenir troublé dès les années soixante. Ville séduite par des nervis aux doigts crochus et fascinée par le faste en toc d'une extrême droite chatoyante à la couleur caméléon. Une gastronomie véganisée, socca et salade niçoise du terroir, caviardant la porchetta et renvoyant la bella poutina aux limbes préhistoriques. Une privée, ex-alcoolo toujours toxico, virevoltant sur sa Vespa et sur les réseaux sociaux. Une enquête sur un SDF d'Érythrée ayant échappé à la noyade mais pas à la bastonnade. Comme chez Tarentino, le noir cause teuton et les coupables sont des agités du bocal ob

Vendanges saignantes

 Le septième — Richard Stark aka Donald Westlake — Rivages/noir 10/2014   Du Parker sans Claire, première manière. De la quintessence de la mécanique Parker. Un braquage parfait suivi d'un impondérable, l'élément humain. Pas un complice trop gourmand, mais un idiot rongé par le ressentiment et la haine des femmes. Le grain de sable est un amateur, cette race importune qui agace Parker et qui bénéficie de la chance des innocents. Dans cette chasse au butin deux fois volé, les complices de Parker perdront leur sang-froid et récolteront du plomb. Parker toujours sagace et pugnace malgré des vents contraires tuera le scélérat et récoltera son quota, le septième. Nous sommes bien dans un polar où l'auteur n'hésite à dénoncer la sale manie des plus riches à éviter l'impôt par tous les moyens et la mauvaise formation des policiers. Et qui ne méprise pas ses lecteurs en citant Shakespeare, ou en faisant allusion aux héros de Victor Hugo ou de Simenon. Un clin d'œil aux

Ethno polar perdu dans les sables mouvants du permafrost

 LËD — Caryl Férey — Les Arènes 01/2021 À chier. Putassier et convenu. L'ethno-polar en état de décomposition avancée. Férey a-t-il trop pressé le citron ou l'atmosphère gelée lui a figé les neurones ? Chi lo sa ? Les cartes postales de Sibérie avec des clichés usés, ressassés, ossifiés, congelés et sans goût sonnent le glas du genre. Il est temps de jeter le moule, il ne produit plus que des bouses. Extrait : Norilsk était une ville vortex, un poison psychique qui aspirait le cerveau des hommes échoués là, vous ramenait larves dans l’œuf, en fusion au cœur d’un noyau perdu.[...l'auteur en a pris une bonne dose, ceci explique cela !]

L'écologie sera radicale ou ne sera pas

 Piégés dans le Yellowstone — C.J. Box — Seuil 10/2013 Un raid dans le wild avec un flic alcoolique et relaps et une caricature de républicain aussi ridicule que reaganien. Un thriller trop compliqué et trop sanglant. Mais les touristes servent de nourriture à la faune locale, — un bon touriste est un touriste mort —, et le magot est recyclé par les mulots. Écologie radicale réjouissante. Les assassins périssent ou pourrissent dans un cul de basse fosse. Et les gamins agaçants mais touchants repartiront vers le soleil couchant, la bannière étoilé claquant au vent. Fermez le ban. Extraits : Tout est devenu beaucoup plus sauvage et plus dangereux que par le passé. La population de grizzlis a bigrement augmenté et rien n'est fait pour la réduire. Et le retour des loups a complètement changé l'écosystème. J'ai entendu des vieux de la vieille comparer ça à la réintroduction des gangs de rue dans les centres-villes, là où ils avaient disparu depuis longtemps. (page 319) — Permets

Rambo perd la boussole

Chasse à l'homme — Jean-Bernard Pouy & Patrick Raynal — Mille et une nuits 03/2000   Un cadavre exquis et sulfureux de deux pros du polar. Une course de relais, – 2000 signes chacun –, pour nous amener à l'inattendu. La traque et la trique. Mais ne dévoilons pas le traquenard des deux compères malicieux et irrespectueux. L'entourloupe littéraire laissera deux soldats au tas et libérera deux gars qui poseront le barda. Une nouvelle déboussolée du duo doué à retirer gaiement d'urgence.   Extraits :  – Il faut qu'il parle, Casanova. C'est tout ce que vous avez à savoir. – Vous me rappelez mon premier sergent. Vous savez ce qu'il disait ? – Chercher à comprendre, c'est commencer à désobéir. C'est ça, hein ? On a eu le même, Casanova. On a tous eu le même. (page 9)   Une balle dans la nuque et tout serait réglé. La conscience, après tout, n'est pas fournie aux flics avec le barda. (page 39)

MAFIA

 Il giorno del lupo — Carlo Lucarelli — Einaudi 08/2008 Lu en VO le troisième volet des aventures de Coliandro, le flic rigolo et gaffeur de Bologne. Des rafales de cazzo et de minchia, — Bitte et vit —, à chaque page alternent avec les rafales d'UZI ou celles du Beretta de Coliandro qui vide les chargeurs comme un grand émotif. La ragazza carina, Nikita alias Simona, lui sert de cerveau, le sien étant en mode alternatif et plus souvent sur Off que sur In. Il travaille aux Stup, mais sa mission principale consiste à approvisionner la cantine centrale en yoghourt. Poste frustrant pour un surintendant. Pour rendre service, il va se retrouver au milieu d'une guerre entre différentes branches de la mafia et trahi par des corrompus. L'action est ponctué par des interludes d'écoutes pas toujours légales ou des articles de l'auteur lui-même pour éclairer cette affaire fort embrouillé. Par miracle, Coliandro s'en sort bien, passe en même temps inspecteur, et des yogourt

Vacances à l'ombre !

 Rebelles de la nuit — Marc Villard — Le Mascaret 1987 Tramson, un éducateur de rues vire au vengeur même pas masqué, abandonnant Farida, sa copine et Céline, sa fille pour prendre des vacances à Fresnes. Pas trop malin et pas trop crédible. On aperçoit un Llama « Super Comanche » en 44, copie du S&W modèle 29, avec en prime, une bande ventilée empruntée au Python. Barbès ressemble beaucoup à l'Harlem de Chester Himes. Sympathique et amusant. Extraits : — Je t'avais dit : pas toucher la femme blanche, bédouin, bredouilla-t-elle. Les deux hommes, affolés par cette poitrine que révélait le vêtement entrouvert, avancèrent vers elle, les yeux exorbités. Alors, elle fit jaillir sous la lumière la grenade quadrillée. En trois bonds légers, elle parvint à la porte et dégoupilla l'engin de mort. Pétrifiés, Omar et Sonny Boy regardèrent rouler vers eux cette boule de pétanque infernale. L'explosion les happa dans son orbe et le café Hammadi devint une nostalgie. (page 78) Qu

Nietzschéen

 Un loup chasse l'autre – Donald E. Westlake – Série noire n° 838 mai 1995 Un vrai bijou du maestro. Avec un héros minable et miro, sans expérience mais aussi sans indulgence. C'est l'homme du ressentiment. Il va rendre les coups, mettre les pendules à l'heure et obtenir sa revanche. Westlake est éblouissant, il croque la face cachée de l'Amérique de la liberté : syndicats bidons, policiers marron et presse à sensation. Il enchaîne les versions des mêmes faits avec des coupables différents. Il dessine avec finesse le self-made-man, l'arriviste aux dents longues, le libéral roublard qui incarne ce pays dynamique, efficient, sans morale et sans pitié. Cruel et drôle. Extraits : Walter haussa les sourcils : — L'a-t-on aidé à accomplir ce voyage ? — Oui, par l'organe d'une combinaison quaternaire d'ovoïdes métalliques à propulsion ultra-sonique. — Et ces dires dont la conjointe serait l'auteur ? — Il s'agit là d'une altération prévaricato

Enfoiré de Monoprix !

 Kebab Palace – Marc Villard – 10/2013 Polaroïd in8 Un titre qui claque, un oxymore graisseux et épicé. Un cours sur les cuites et le vomi sur fond d'Alsace enneigée. Et de chinoise assassinée. Subséquemment, Cécile et Lulu enquêtent et traquent. C'est sordide mais on sourit alors que ça va finir mal. Mais on ne va pas en faire un fromage. Douce France, doux pays de mon enfance... Extraits : Elle montre, de façon répétée, ses fesses au pharmacien car l'ordonnance de sa mère est périmée. Elle est très dévouée à sa génitrice. (page 9) — C'était bien les Alcooliques Anonymes ? — C'était une fausse adresse. Après, je suis allée au Monoprix pour acheter du saumon surgelé et deux mecs buvaient du Ricard pur dans un rayon. — C'est pas ta faute alors, dit Lulu. — C'est sûr. Enfoiré de Monoprix. (page 31)

Savage Night

 Nuit de fureur — Jim Thompon — Rivage/noir Avr 1992 Le dernier contrat d'un sicaire tubard, retors et alcoolique. Manipulateur et manipulé, dans une Amérique hypocrite, obsédée par l'argent et le sexe. Le polar virera au cauchemar. Puis au fantastique avec la traversée du tueur, des neuf cercles de l'enfer avec son double féminin, démon difforme et découpeur. Une œuvre sombre et dérangeante, mais une œuvre majeure du grand Jim Thompson. Extrait : Il y avait quelque chose de triste, dans cette ville, quelque chose qui me faisait penser à ces hommes chauves qui se ramènent sur le dessus du crâne les cheveux qu'il leur reste aux tempes. (page 10)

Well... nobody's perfect!

 Jonathan Latimer — Gardénia rouge — Rivages/Noir 03/1986 ISBN 9782869300040 La dernière et une des meilleures aventures de Bill Crane, un brillant privé qui démêle les fils d'une intrigue bien embrouillée. C'est aussi un alcoolique. Well... nobody's perfect! Il est accompagné par une blonde somptueuse et astucieuse qui joue le rôle de son épouse car l'enquête dans un milieu prétentieux et snob impose la discrétion. Le troisième larron, Doc Williams, jouera le chauffeur avant de démontrer ses talents au revolver. C'est le premier hard-boiled classique où une femme fatale est en même temps détective. Les morts sont empoisonnés au monoxyde de carbone, meurtre, accident ou suicide ? Bill attendra la dernière page du roman pour révéler la vérité au lecteur médusé par son talent et ses méthodes. Édité en anglais en 1939, ce polar plein d'humour sera publié en France grâce à François Guérif, d'abord chez Red Label, puis chez Rivages (n°3 1986) dans une très bonne